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Les chroniques polars et bédé        de Claude Le Nocher - ABC POLAR

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G.J.Arnaud : Peur blanche pour le Commander (Fleuve Noir, 1977)

G.J.Arnaud : Peur blanche pour le Commander (Fleuve Noir, 1977)

En guise d'hommage à Nelson Mandela, au long combat qui fut le sien, à la capacité qu'il eut de fonder une nouvelle nation, retour sur un roman plutôt marquant de Georges-Jean Arnaud. En 1977, Mandela est approximativement au milieu de sa peine de prison. Il ne figure pas dans cette histoire. Le régime d'apartheid va durer. Ce dont ne doutent pas ses partisans : “Depuis trois siècles qu'ils sont dans ce pays, ils en ont vu d'autres, et ils sont toujours là. Leur foi en eux-mêmes, c'est du béton armé. Ils se feraient plutôt hacher sur place que de céder un pouce de leurs prérogatives et, d'ailleurs, ils ont assez de réalisme pour consolider leur position. Faites-leur confiance : dans dix ans, ils seront encore les maîtres.” Ce n'est qu'en 1991 que sera aboli l'apartheid, quatorze ans après.

Masquée par la formule “développement séparé”, la ségrégation raciale s'exerce depuis l'époque des Boers, des premiers Afrikaners radicaux, mais deviendra institutionnelle dès 1948. Les lois interdisent à peu près tout aux “coloured people”. Dans ce roman, on voit que les bus réservés aux Noirs ne sont pas si nombreux, que les taxis pour Blancs leurs sont interdits, que seuls les restaurants d'hôtels internationaux tolèrent des clients Noirs, qu'il leur est compliqué d'obtenir des documents administratifs. Quant aux relations intimes entres races, c'est strictement sanctionné. Un des personnages en a fait l'amère expérience. À la moindre entorse aux lois, on exile les Noirs dans ces bantoustans hostiles et ils perdent illico la nationalité sud-africaine. Au mieux, on les laisse végéter dans des townships insalubres : “─ L'eau commence à manquer, et nous n'avons pas assez de camions-citernes pour les ravitailler.

─ Pas de camions-citernes, la belle blague. Les ouvriers ont dû manifester ou faire grève, et on les prive de flotte. C'est le coup classique. Le village est installé sur une couche de rochers. Pas la moindre source. Pour l'alimenter, une canalisation de trois pouces seulement. Reliée à un bassin de retenue qui a sec dès le printemps. Que voulez-vous faire sans eau ? […] Il y a des dizaines de villages de ce genre. Je me demande si on est pas plus heureux à Soweto. Au moins là-bas, les gars retrouvent une certaine solidarité.”

En effet, Soweto fut le plus emblématique (car le plus peuplé) de ces ghettos créés par l'apartheid. Bien documenté, y compris sur les mouvements de résistance autour de l'ANC, G.J.Arnaud nous permet ici de toucher du doigt la réalité de cette époque. Plus qu'une histoire d'espionnage à la James Bond, c'est un livre alliant aventure et témoignage. Nul doute qu'il fit réfléchir quelques-uns de ses lecteurs, en un temps où la France (vendant des armes aux Blancs d'Afrique du Sud) ne condamnait absolument pas l'apartheid...

 

Serge Kovask, dit Le Commander, n'est pas un agent secret de la CIA. Il est chargé de missions de renseignements pour le sénateur américain Holden. Kovask est assisté de la mûre Cesca Pepini, dite La Mamma, lors de ses enquêtes de terrain. Il s'agit généralement de jauger l'implication des États-Unis dans des situations internationales sensibles. En 1977, Jimmy Carter vient d'être élu président. Le diplomate Henry Kissinger veut croire que les Blancs d'Afrique du Sud sont disposés, comme leurs voisins de Rhodésie, à faire de gros efforts pour instaurer la justice raciale et sociale envers les Noirs. Ce pays mérite-t-il le soutien économique, politique, voire militaire, des États-Unis ? C'est ce que Kovask et Cesca Pepini doivent vérifier au cours de leur séjour en Afrique du Sud.

À Johannesburg, le Commander rencontre un secrétaire d'ambassade désireux de l'aider clandestinement. C'est ainsi que Kovask entre en contact avec Corbieu, un Français qui a connu de sévères déboires dans ce pays. Employé à la gare de triage, il a constaté que du matériel militaire arrivait en grande quantité depuis quelques temps. Pas seulement des armes, mais aussi des blindés et autres matériels lourds, en provenance de France. Cet arsenal très coûteux est livré à des propriétaires privés, Afrikaners blancs. Preuve qu'ils ne céderont rien aux Noirs, qu'ils sont prêts à écraser de nouveaux troubles, tels que le pays en a récemment connus.

Alors que Corbieu s'est fait repérer par les autorités, Kovask ne peut guère compter sur le secrétaire d'ambassade. Libéré, Corbieu conduit le Commander dans une ferme qu'il possède, près du désert du Kalahari. Le Français est un sympathisant actif de l'UWS, une branche de l'ANC. Avec leurs voisins maquisards Namibiens du SWAPO, l'UWS cherche à contrer les milices sud-africaines afrikaners. De visu, Kovask va constater que des groupes armés Blancs s'entraînent intensivement avec les blindés importés, sous la direction d'ex-nazis. Ni Corbieu, ni l'activiste noir Wezalko, ne transigeront vis-à-vis de leurs ennemis.

De son côté, Cesca Pepini est chargée d'approcher un financier français opérant en Afrique du Sud, Gérard de Laurens. La Mamma s'intéresse au cas d'une des employées de l'hôtel international où elle séjourne, Rebecca. Contrainte de coucher avec un notable bantou, cette jeune Noire cultivée de Soweto est l'amante de Gérard de Laurens. Elle espère qu'il l'aidera à quitter ce pays si inhospitalier. À contre-cœur, la Mamma doit manipuler quelque peu la jeune femme. Si Cesca Pepini reste néanmoins la meilleure alliée de Rebecca, cette dernière risque fort de se mettre en danger. Jouant à la milliardaire américaine, la Mamma essaie de percer les combines de Gérard de Laurens...

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